Ce que fait DANAYA SO pour les enfants

… pour les enfants des travailleuses du sexe

@Photo d’illustration d’une école au Mali

@Photo d’illustration d’une école au Mali

Les enfants des travailleuses du sexe, filles et garçons âgés de 0 à 18 ans, sont appuyés par DANAYA SO. Les moins de 5 ans en situation de précarité sont appuyés pour l’achat de médicaments en cas de maladie. Ceux âgés de 7 à 10 ans (filles et garçons) sont inscrits à l’école publique. Ceux âgés de 11 à 18 ans bénéficient d’appui en apprentissage professionnel, d’alphabétisation et d’installation en fin de formation. Pour tous les enfants, un suivi sanitaire est assuré, aussi des démarches de réinsertion dans un cadre familial, si les circonstances le demandent.

… pour les mineures victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales 

Les mineures victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales, sont appuyées sur le plan santé, apprentissage professionnel, alphabétisation et insertion socio-économique afin qu’ils trouvent des alternatives au travail du sexe. DANAYA SO collabore avec les services sociaux, le Samu Social et Caritas Mali afin de faire sortir ces mineures de la situation d’exploitation. 

Un bon nombre de ces mineures a déjà un jeune enfant (0 à 3 ans) qui bénéficient des mêmes prestations que les autres enfants à DANAYA SO. Mais pour ces filles-mères un suivi supplémentaire est nécessaire pour assurer leur bonne prise en charge au niveau sanitaire et éducatif. Car ces jeunes filles qui sont déjà mère sont souvent expulsées par leur famille à cause de leur grossesse précoce, ou il s’agit d’ex-aides-ménagères mineures venues du village en ville, sans attache familiale. Souvent elles n’osent pas rentrer au village avec un enfant hors mariage et fréquemment déménagent dans des maisons closes avec leurs enfants.

LA CONVENTION DE L’ONU RELATIVE AUX DROITS DE L’ENFANT

Le 20 novembre 1989, l’assemblée générale des Nations Unies a adopté la Convention relative aux droits de l’enfant. La convention concerne tout être humain jusqu’à l’âge de dix-huit ans, sauf si la loi nationale accorde la majorité plus tôt.

Au Mali l’âge légal du mariage est fixé à 16 ans avec le consentement des parents.

La Convention des droits de l’enfant qui repose sur quatre principes fondamentaux:

1. Le droit à l’égalité
Aucun enfant ne doit être discriminé en raison de son sexe, de ses origines ou de sa nationalité, de sa langue, de sa religion, de la couleur de sa peau, d’un handicap ou de ses convictions politiques.

2. Le droit au respect de l’intérêt supérieur de l’enfant
Chaque fois que l’on prend des décisions susceptibles d’avoir des conséquences pour les enfants, l’intérêt supérieur de l’enfant (son bien) prévaut. Ceci est valable aussi bien au sein de la famille qu’au niveau de l’action de l’Etat.

3. Le droit à la vie et au développement
Chaque enfant doit avoir accès aux soins médicaux, pouvoir aller à l’école et être protégé contre les abus et l’exploitation.

4. Le droit de faire entendre son avis et de participer
Tous les enfants doivent être pris au sérieux et respectés en tant que personnes. Cela signifie aussi qu’on les informe de manière adaptée à leur âge et qu’on les associe aux décisions.

@Photo d’Alain Meier

@Photo d’Alain Meier

«Quand je suis grand, je veux construire un dispensaire»

Des enfants du Mali parlent de leur droit à la santé et à la protection.

@Photo d’illustration d’une école au Mali

@Photo d’illustration d’une école au Mali

Enquête menée par Von Broulaye Sangaré, Sylvia Mollet (Article dans Bulletin Medicus Mundi, Basel, Suisse)

Dans le quartier populaire Faladje Sokoro du District de Bamako, capitale du Mali, des enfants d'une moyenne d'âge de 13 ans ont répondu à la question: « Qu'est-ce que tu feras pour les enfants du Mali dès que tu auras l'âge adulte? » A la question posée, les enfants ont exprimé leurs idées librement par écrit.

Ce sont 14 filles et garçons des familles monoparentales qui sont scolarisés la 5ème ou 6ème année. Dans la plupart des cas ces enfants vivent avec leur mère qui est célibataire, divorcée ou veuve. Ils sont tous issus des familles pauvres. Les enfants ont été questionnés dans le cadre du projet LAKANA SO (Sous-projet de DANAYA SO) à Bamako qui appuie les enfants des mères vivantes seules avec leurs enfants dans des conditions de vie difficiles. Ces enfants ne doivent leur scolarisation qu'à la participation de leurs mères aux activités de LAKANA SO.

 

« Il nous manque du repos »

La deuxième préoccupation de la majorité des enfants interviewés est le droit au divertissement et au repos. Ces deux ont été mentionnés avec la même fréquence par presque tous les enfants. Concernant le manque de repos, ces enfants ne se reposent presque pas dès l'âge de 3 ans; ils sont considérés comme pouvant venir en aide à la mère dans tous les domaines concernant la gestion de la famille (ménage, piler le mil, recherche de l'eau potable, vente de fruits etc.) et cela souvent au prix de non-inscription à l'école ou d'apprentissage d'un métier. En ce qui concerne le droit aux divertissements, en plus du besoin exprimé d'avoir plus de temps pour soi-même les enfants souhaitent la construction des centres de jeux, des maisons de théâtre des enfants et des terrains de football. Ces enfants par rapport à beaucoup d'autres avec qui ils vivent dans le voisinage sont dépourvus depuis leur enfance de jouets. Ils vivent dépendants d'autres enfants dans la satisfaction de leur instinct de jeu.

« Le droit d’être lavé proprement... »

Les enfants sont conscients de l'importance de la santé pour leur survie. Six enfants mentionnent la promotion de la santé en générale, deux parlent de la construction de centres de santé spécialement conçus pour les enfants. Un d’eux souhaite même être pédiatre pour mieux servir la cause sanitaire des enfants. Il est vrai que les adultes pauvres, étant sensibilisés de s'adresser à un médecin en cas de maladie, hésitent quand il s'agit de faire le même geste quand leur enfant est malade. Souvent ils préfèrent attendre si la maladie perdure. Les symptômes de maladie chez les tous petits sont souvent interprétés comme des problèmes de dentition et le suivi médical intervient trop tard dans certains cas.

Un autre point non moins important a été soutenu par quelques enfants, c'est d'avoir accès à une alimentation suffisante et de qualité. Enfin vinrent pour trois le droit à un habillement décent et un enfant mentionne même le droit d'être lavé proprement. Ce passage montre l'état de pauvreté de leur mère. Ce sont des enfants, torses nues, au milieu souvent de leurs camarades d'âge bien habillés et bien lavés qui vivent quotidiennement cette réalité.

«Les vaccinations sont importantes pour nous enfants »

Deux préoccupations majeures ont animés les enfants, à savoir le droit à la santé et le droit aux divertissements et au repos. Dans le domaine de la santé, la nécessité du suivi des vaccinations est mentionnée par neuf enfants. A remarquer à cet effet que les enfants suivent à côté de leurs parents les campagnes de sensibilisation dans les médias sur les sujets de vaccination et ils connaissent la portée de leur importance. Ils savent que des décès d'enfants en sont certainement liés au manque de suivi des périodes vaccinales et ils sont au courant que leurs parents n'en font pas une priorité, butés à la recherche quotidienne de la subsistance de la famille.

Témoignages

Témoignages de travailleuses du sexe au Mali par rapport à la situation des enfants dans leur milieu et Mineures victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales.

 

Situation des enfants des travailleuses du sexe

« Certaines jeunes filles qui rentrent dans une maison close, elles ne font même pas une année pour tomber enceinte. Leurs copines cotisent pour financer leur accouchement à l'hôpital. Il y a des travailleuses du sexe qui ne trouvent pas de l'argent pour aller à l'hôpital. Même deux semaines après l'accouchement elles reprennent la prostitution. Ces jeunes filles n'ont même pas de chambre pour laisser l'enfant quand elles reçoivent les clients, certaines laissent l'enfant dehors même où il y a les moustiques. L'enfant dort malgré cela parce que sa mère l’a drogué. »

« Tu viens dans la maison close, tu trouves que la maman est dans la chambre avec quelqu'un, son enfant est entrain de pleurer devant la porte. Peut-être quelqu'un viendra prendre l'enfant pour lui donner à manger, la maman s'en fout, elle est droguée. Et seulement le soir, quand l'effet de la drogue aura diminué, elle viendra chercher son enfant. »

« Si une travailleuse du sexe qui vit dans une maison close ou dans le quartier, si elle a eu un enfant, comment peut-elle avoir son acte de naissance? Quand l'enfant a l'âge d'aller à l'école, est-ce qu'il peut aller à l'école? Ses enfants peuvent avoir cinq ans ou dix ans, ils n'ont pas l'acte de naissance. Tu peux faire l'acte de naissance si tu connais le père de l'enfant. Et puis il n'y a pas question de mettre l'enfant à l'école. Si le garçon n'a pas fait l'école, il va apprendre à faire le vagabondage. Si tu as des filles, ce que tu fais, elles vont l'apprendre et faire la même chose. »

« La nuit les jeunes filles droguent leurs enfants, l'enfant dort jusqu'au matin, elles sortent pour le travail du sexe. Elles donnent le Sédaspir, les «bleu-bleu» à l'enfant. Certains enfants deviennent même mentalement retardés parce que leurs mères les droguent chaque nuit. Elles vont accoucher, même pas vingt jours après elles vont recommencer à se prostituer. L'enfant peut avoir la diarrhée, et ces femmes lui donnent toutes sortes de médicaments. »

« Il y a des femmes âgées qui n'ont pas peur de Dieu, ce sont des travailleuses du sexe retraitées. Des jeunes travailleuses du sexe viendront dire à une d’elles: ‘Je sors chaque nuit et je laisse mon enfant avec toi.’ La vieille garde l'enfant chez elle. Tous les jours, la jeune femme lui donne mille F CFA. La vieille lave l'enfant, elle l'habille et le nourrit. Elle peut garder quatre à cinq enfants chaque nuit. 

Si les gens disent que cet enfant a l'âge d'aller à l'école, cette femme dira: ‘Je ne sais pas si la mère est d'accord avec ça.’ Elle ne se fait pas de soucis pour cela, elle pense seulement à l'argent. 

Certaines filles laissent leurs enfants une ou deux semaines chez cette femme âgée, elles ne reviennent même pas. Elles oublient de mettre l'enfant à l'école. La vieillie femme cherchera de bar en bar pour trouver la mère de l'enfant qu'elle garde, pour lui dire: ‘Prends ton enfant, tu ne viens pas chez moi, tu ne viens pas payer ton argent, alors prends ton enfant.’

« Les enfants ne connaissent pas leur père. Si les enfants demandent après le père, la mère dit qu’il s’est fâché à cause de quelque chose, il a fui et qu’il est mort là-bas et que l'enfant n'a pas d'autres parents ici. Les enfants disent que cela n’est pas vrai parce que les gens leur ont dit autre chose. »

« Si tu es dans le travail du sexe, tu vas vieillir un jour. Tu ne trouves plus d’argent et les gens n’ont plus pitié de toi, tes enfants aussi n’arrivent pas à se marier à cause de toi, on va indexer tes enfants et tes parents dans la rue. »

Mineures victimes d’exploitation sexuelle à des fins commerciales


« Toi tu as passé toute ta vie dans le travail du sexe et maintenant tu vas encourager ta fille à faire comme toi ; des filles qui n'ont pas encore des seins. La mère est dans une maison close et la fille aussi est dans une maison close. » 

« Je suis née d’une famille pauvre. Quand mon papa est décédé, ma mère devrait se débrouiller avec nous, ses cinq enfants. Comme je suis l’aînée, je faisais le petit commerce qui ne nous apportait pas assez d’argent. Alors je me suis mise au travail du sexe clandestin. Au début ma mère en était contente, car j’amenais beaucoup d’argent. Mais, au bout d’une année, elle avait honte pour moi. Ainsi, j’ai quitté ma famille pour m’installer dans une maison close. »

« C’est ma propre mère qui m’a insultée chaque fois: ‘Tu ne vaux rien, regarde les autres jeunes filles. Elles ont tout, pourtant elles ne sont pas mariées, elles sortent et toi tu es toujours à la maison et tu ne reçois pas de visiteurs.’ Finalement elle m’a interdit de manger en famille et j’étais contrainte de sortir. La nuit je vais dans les bars, souvent dans les hôtels, souvent tout au long des avenues. Je signale n’importe qui au passage. Je ne voulais plus arrêter jusqu’à l’annonce du Sida, là j’ai dit, je n’accepte plus un homme sauf celui qui me marie. »

« Il y a des pères qui demandent de l’argent à leurs filles. La fille passe la nuit dans les bars. Le matin la mère et le père demandent de l’argent. Ils vont te faire des bénédictions, tant que tu gagnes de l’argent pour les satisfaire, ils ne te critiquent pas. »

« La fille ne peut plus sortir du travail du sexe parce que sa mère l’encourage. Quand sa fille a eu dix ans, la maman commence à l’insulter: ‘Tes copines cherchent de l’argent pour aider leur mère et acheter des habits pour leur maman. Et toi tu ne fais que dormir.’

Tu vas dire que tu es à l’école. Elles vont te dire que tu ne réussiras jamais et que tu ne connais rien en classe. Et après tu te décourages et tu quittes l’école. Tu vas faire toute la journée en te promenant et cherchant de l’argent pour la maman. Si ton père te demande, ta mère dit qu’elle à commissionné la fille. Et la maman est très contente de cet argent. Elle paye la location et le prix de condiments. Tant que la fille donne de l’argent, elle ne se plaint pas. »

Les filles venues des villages 

« Quand elle arrive du village et dès qu'elle travaille chez une famille, si elle est payée à cinq mille F CFA, le mari va proposer dix mille F CFA de salaire pour le rapport sexuel. Elle serait obligée d'accepter, parce que la fille est venue pour chercher de l'argent en ville. Tôt ou tard sa femme le saura. Si l’épouse sait que la fille sort avec son mari, elle s'énerve et elle va la chasser. Certaines de ces filles ont quatorze, quinze ans. Et souvent elles sont dans des familles où le mari de sa patronne est un vieux. Ce sont les vieux qui font ça.

Si elle sort avec le mari de la patronne, celui-là va commencer à lui acheter des habits et il va l'inviter dans les bars, les restaurants. Dès que la fille quitte le travail le soir, le mari peut la rejoindre dans un bar. La femme peut être à la maison, mais la fille et le mari vont se voir. 

Et après maintenant, la fille peut choisir qui que ce soit, continuer avec le mari, ou elle peut avoir plusieurs clients ailleurs. C'est comme ça qu'elle commence. Et après elle commence à fréquenter les bars. Et la fille s’habitue à avoir beaucoup d'argent avec les hommes. Même si elle pourrait travailler quelque part, elle ne voudra pas. Si elle gagne cinq mille F CFA quand elle sort un soir, et cinq mille si elle travaille pendant un mois, le salaire est petit pour elle. Au départ ça sera un problème, parce que peut-être elle aura honte, mais quand elle commence à sortir avec le mari, deux ou trois fois seulement, elle n'aura plus honte. »

« Ces filles ne rentrent plus dans leur village, elles restent à Bamako jusqu’à ce qu’elles tombent malades. Certaines des anciennes aide-ménagères entrent dans les maisons closes. La majorité des femmes maliennes dans les maisons closes étaient des aide-ménagères avant. Quand elle quitte le travail chez son patron, elle va dans un bar. Et pendant deux, trois jours elle va s'entretenir avec les filles là-bas qui pourront la guider vers une chambre. »


« C'est difficile que la fille rentre au village. Elle peut faire cinq ans, six ans comme ça, elle ne rentre pas au village. Mais souvent elle y envoie des habits, de l'argent. Si elle avait un mariage prévu au village, elle le laisse tomber. L’aide-ménagère ne connaît rien des contraceptifs. Quand elle arrive en ville, c'est tout juste pour chercher l'argent. Si elle a trouvé des enfants en ville, c'est un problème aussi, elle ne peut pas rentrer. Ce sont des filles qui ont à l'âge de cinq ou sept ans déjà un fiancé au village. Elles arrivent ici et avec l’atmosphère de la vie urbaine, c'est tout un problème qu'elles retournent encore au village pour se marier. Et c'est sûr que les hommes de la ville ne vont pas les épouser parce que ce sont des villageoises. Donc elles sont obligées d’entrer dans le travail du sexe. »

« Les filles qui quittent les villages et viennent à Bamako, certaines vont dans une famille ou chez une vieille de leur village où elles vont loger pour un premier temps. Après, c'est la vieille qui les place dans les ménages pour travailler comme aide-ménagère. Mais quand la fille va commencer à se prostituer, la femme est au courant. Elle prend son argent. Si la fille gagne beaucoup, elle doit lui donner dix mille F CFA, parce que la vieille sait ce que la fille fait. Mais si tu ne l'a donnes rien, dès que les parents vont envoyer une lettre, elle va leur raconter; voilà, ta fille a refusé de travailler. Elle ne cherche pas des clients pour toi, elle ne fait rien, sauf cacher la vérité aux parents. Elle continue à être la correspondante des parents. Souvent cette femme est une parente ou simplement une femme qui se montre gentille au début. »

« Les femmes qui amènent les petites filles à Bamako ont leurs maisons closes où elles les font loger. J'ai vu un cas à Banconi, une femme qui s'appelle Aïssa, la femme leur achète des vêtements pour que les filles s'habillent bien et restent dans son bar. Chaque matin une des filles va déposer l'argent gagné dans une banque, si c'est peu ou beaucoup. Et après, elles mettent un peu d'argent ensemble pour préparer à manger. Si tu as fait une année là-bas, elle t'amène dans une autre maison et elle cherche une autre fillette pour te remplacer. Si la fille refuse de donner son argent à sa propriétaire, elle la livre aux vagabonds pour la blesser. »